Ora aikido aïkido traditionnel du japon
Ora aikido

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  • ChatGPT...

    Voici que ces derniers mois, la toile et autres sphères humaines s'enflamment. L'outil d'Intelligence Artificielle devient, d'apparence tout au moins, une entité à part entière. A tel point que certains grands noms du monde de demain s'inquiètent publiquement, et demandent une pause dans la recherche du développement de cette IA.

    Il est clair qu'un grand changement est à venir. Et qu'un grand nombre d'activités physiques et intellectuelles va être transféré de nous à la machine. En tout cas, dans l'éventualité que l'IA fasse demain partie de notre quotidien, c'est ainsi que la vie risque de se trouver façonnée. Pour le meilleur et pour le pire, comme d'habitude.

    Ceci étant, en observant mon expérience de la pratique de l'aïkido en tant que discipline, et mes questionnements existentiels personnels qui s'y associent, je sais qu'il y a une chose que ChatGPT ne pourra jamais faire à ma place. Celle d'offrir au monde la meilleure version de moi-même.

    Personne d'autre que moi-même peut guérir mes blessures et mes manques.

    Personne d'autre que moi-même peut cultiver mon jardin intérieur.

    Personne d'autre que moi-même peut lever les ombres qui obscurcissent mon cœur. 

    Personne d'autre que moi-même peut aimer et protéger mon enfant intérieur. 

    Personne d'autre que moi-même peut emprunter ce chemin. 

    Et l'aïkido est un magnifique et puissant outil au service de toutes ces belles et passionnantes découvertes.

    Quelle joie d'être sur cette voie et merci à tous mes Senseï, professeurs et ami-es qui me guident. 

     

  • 初心 Shoshin, l'esprit du débutant

    Les arts martiaux japonais sont intimement liés au Bouddhisme, au Shintoïsme, et dans une moindre mesure au Taoïsme et au Confucianisme. Un des concepts hérités du Bouddhisme est celui de shoshin, l'esprit du débutant.
    Shoshin consiste à avoir l'attitude et l'état d'esprit de quelqu'un qui s'engage dans une pratique pour la première fois. Une attitude faite d'enthousiasme, de modestie, d'humilité et d'absence de préconceptions.

    Shoshin est très souvent illustré par une histoire de sagesse mettant aux prises un maître de zen et un étudiant. Il en existe plusieurs versions mais l'essence est celle-ci:

    Un célèbre maître de zen reçoit un jour la visite d'un homme qui déclare vouloir étudier avec lui. Le maître l'invite à boire le thé pendant que le visiteur lui expose son passé, lui décrit son cheminement spirituel, ses découvertes, ses réflexions et nomme les maîtres qu'il a côtoyés.

    Le maître écoute patiemment et recommence à lui verser du thé dans sa tasse déjà pleine. Celle-ci se remplit à ras bord et finit par déborder, le thé coulant tout autour. L'élève s'écrit alors "Que faites-vous?! Ma tasse est déjà pleine!".

    Et le maître lui répond "Comment voulez-vous qu'un enseignement pénètre votre esprit alors qu'il est déjà plein comme cette tasse?"

    Dans cette époque de rentrée il y aura comme chaque année dans tous les dojos d'anciens élèves qui reviendront et de nouveaux élèves qui arriveront. Il n'est pas facile même pour un débutant d'avoir le shoshin. Mais c'est encore plus difficile pour un ancien.Un débutant arrive souvent avec des préconceptions liées à ce qu'on lui a raconté, ce qu'il a pu lire ou voir sur la voie dans laquelle il s'engage. A une époque où nous croulons sous les informations superficielles il aura des attentes et une vision de ce qu'il va étudier et de la façon dont se déroulera son apprentissage. La situation sera d'ailleurs exacerbée s'il possède une précédente expérience martiale, ou pire encore un vécu dans la même discipline.Mais généralement un débutant se rend rapidement compte de l'écart qui sépare ce qu'il croyait deviner et ce qu'il découvre. Face à la réalité il décidera alors si il désire s'engager plus avant ou chercher un autre chemin.


    Pour un ancien retrouver le shoshin est extrêmement difficile mais encore plus indispensable à sa progression. Les années passant on se familiarise naturellement avec la discipline que l'on étudie. L'environnement du dojo, les techniques, les rituels de la pratique tels que les saluts deviennent une habitude. Et de l'habitude naissent des automatismes. Des automatismes qui nous permettent de pratiquer avec plus d'aisance et de facilité.
    Mais c'est aussi là que la progression cesse souvent brutalement. Et l'on met parfois des mois, des années à s'en rendre compte. Certains se complaisant à ce stade n'en prendront parfois même jamais conscience. Il y en a parmi les anciens que l'on retrouve dans tout dojo. Habiles et impressionnants au premier abord, ils sont souvent des modèles auxquels on s'identifie. Mais les suivre peut-être dangereux car ils sont bloqués à une étape et que leur compréhension reste limitée. L'ancien qui se remet en question et cherche est un meilleur modèle, même s'il peut être moins flamboyant au premier abord…

    L'aisance amène généralement l'orgueil. Et l'habitude nous amène en permanence à lier ce que l'on voit à ce que l'on connaît déjà. C'est la raison pour laquelle les élèves d'un maître sont souvent incapables de le suivre dans son évolution. Bloqués à une étape de sa pratique qu'ils maîtrisent ils ne saisissent pas les changements, le regardant aujourd'hui mais voyant ce qu'il faisait hier… Certains ne dépasseront jamais le stade de pratique qu'ils ont maîtrisé et continueront indéfiniment à peaufiner des techniques dans un travail intermédiaire sans passer à l'étape suivante.
    Beaucoup ont ralenti ou cessé leur pratique durant les vacances estivales. De retour au dojo le premier réflexe est généralement d'essayer de retrouver ses marques, ses sensations. Je crois au contraire que c'est l'occasion de rechercher en soi le shoshin, l'esprit du débutant.

    Il est difficile de se mettre en danger et l'homme cherche toujours la facilité et le confort. Imaginez que vous voyez pour la première fois le professeur ou l'expert qui est devant vous. Retrouvez l'attention que vous aviez lorsque vous avez commencé à pratiquer. Chassez toute pensée qui vous dira au premier geste que vous reconnaîtrez qu'il s'agit de telle ou telle technique. Luttez contre la croyance que vous savez faire. Oubliez ce que vous savez ou croyez savoir, et commencez cette nouvelle saison avec un esprit neuf et ouvert.
    En luttant contre notre orgueil et nos préconceptions au dojo, nous pouvons développer une attitude positive qui nous aidera dans chaque domaine de notre vie. C'est ainsi qu'un travail concret sur la technique amènera des changements dans notre cœur et notre esprit. Le shoshin développe un esprit vierge de préjugés et une attention aiguisée qui nous permettent de voir les leçons qui s'offrent à nous à chaque instant…

     

    Source : ??? Merci à David Stezycky de Senlis ASSETAÏ de l'avoir partagée

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  • ‎Base of our ki no nagare aikido practice

    Traduction en français transmise par Jean-Marc MARTIN (6éme dan Aïkikaï de Tokyo), d'indications pour la pratique de l'aïkido par Peter SHAPIRO.

    Texte riche et très intéressant. C'est la raison pour laquelle je la partage ici avec plaisir. Mais à vous de comprendre ce que vous pouvez ;). Aussi, je me suis permis quelques annotations lorsque le texte pouvait demander une précision (note de Meda:...)

     

    Ki-no-Nagare Aïkido

    1) Emplissez-vous de "ki" avant de bouger et étendez ce "ki" pendant vos mouvements et ce même après que "uke" soit bloqué ou ait chuté. Plus "tori" et "uke" seront investis par le "ki" et meilleure sera la technique. Selon O Senseï, c'est en réalité le "ki" qui crée la technique et non l'inverse.

     

    2) Un principe de base de la pratique, trop souvent oublié, est que la technique doit être répétée 4 fois de suite, sans s'arrêter ni reculer ni briser la connexion entre le "ki" des partenaires. Un des résultats majeurs issus de cette pratique est l'émergence d'un rythme durant les 4 mouvements. Il est aussi important de laisser le partenaire aller au bout de chaque mouvement. Il ne doit pas être interrompu ni contré, même si le mouvement est incorrect ou si il y a "suki". (note de Meda: "espace sensible")

     

    3) Durant un mouvement, maintenez toujours votre attention sur l'ensemble du corps de votre partenaire, du bout des orteils jusqu'au sommet du crâne. Prenez garde à ne pas vous concentrer seulement sur la partie du corps, le poing ou la main, qui attaque ou défend.

     

    4) Essayez de mobiliser votre attention et votre esprit sur votre "hara", comme si vos yeux s'y trouvaient.

     

    5) La pratique de l'aïkido a pour but de perdre l'illusion de la séparation, que nous expérimentons tous du fait de notre perception des limites physiques (nous percevons notre corps comme un objet fini) et de la vulnérabilité de notre propre corps... La compétition et la comparaison augmentent ce sentiment de séparation. L'aïkido est un travail sur la connexion (musubu, tama- no-o, aiki).

     

    6) Nous devons être attentifs à la concentration particulière requise par chacune des trois étapes de chaque technique : le début, le milieu et la fin, qui correspondent généralement au triangle, au cercle et au carré.

     

    7) Les techniques d'aïkido sont élaborées afin de ne pas blesser. "L'atemi" n'est pas supposé atteindre réellement le partenaire. Nous ne devons donc pas craindre de réaliser les techniques avec toute notre énergie. Selon Hikitsuchi Senseï, dans la forme la plus pure de l'aïkido personne ne se touche jamais, les techniques ne devraient donc jamais ressembler à un test de puissance ou de force. Il n'y a pas de victoire en aïkido. En Japonais, O Senseï utilisait les mots suivants afin de respecter ce principe : "Masakatsu" (La seule vraie victoire...) "Agatsu" (...est la victoire sur nous-mêmes...) "Katsu-Hayaibi" (...nous ouvrant les portes d'un état dans lequel il n'y a ni temps ni espace).

     

    8) Il nous faut toujours nous rappeler que le "Aï" de "aïkido" signifie aussi "amour", que l'aïkido révèle l'amour inconditionnel présent dans l'univers nous permettant d'atteindre l'état spirituel qu'O Senseï appelait "l'esprit d'amour et de protection de toutes choses" (Ban-yu-ai-go), ainsi que la connaissance du fait que la race humaine est une grande famille au sein de la plus grande famille encore, que sont le pur principe et l'amour, qui sont l'univers.

     

    9) Il nous faut toujours nous rappeler que selon O Senseï, le succès d'une technique d'aïkido vient du principe "saki-no-saki-no-saki" (note de Meda: "avant de avant"). Même pendant la période avant-guerre, "tori" provoquait l'attaque de "uke". Il ne l'attendait pas afin d'y réagir. Même avant-guerre, O Senseï définissait l'aïkido comme un "budo" de l'unité.

     

    10) L'aïkido est 50% "bun" et 50% "bu".

     

    11) Nous devons toujours essayer d'être attentif à l'aspect ondulatoire de chaque mouvement.

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    Meda

     

  • Intuition plasticité aïkido...la suite

    Il y a un an et demi, je partageais avec vous le résultat d'une réflexion liant une intuition sur l'aïkido et la découverte de connaissances autour de la plasticité du cerveau. Depuis, ma compréhension s'est aiguisée et s'est nourri de nouvelles compétences. Mon premier article sur le sujet présentait le lien qui unissait plusieurs événements séparés :

    - une intuition sur la manière dont on utilise un objet, ici l'aïkido, et qui selon les circonstances peut apporter bienfaits ou méfaits.

    - une rencontre avec Loïc LEHANNEUR et la méthode Padovan qui m'ont donné à voir les potentialités que chacun possède en lui et où certains adolescents autistes ou handicapés pratiquent encore aujourd'hui le junomichi avec nous, au cours adultes.

    - des ouvrages comme « La personne et sa croissance » (Fondements anthropologiques et psychologiques de la formation PRH) qui posait une question essentielle sur l'Homme, « Naît-il programmé, fatalisé ? Où donc est sa liberté ? ». Ou encore « Les étonnants pouvoirs de transformation du cerveau » qui évoquait la rencontre de l'auteur, Norman Doidge, psychiatre psychanalyste Canadien, avec l'extraordinaire faculté de plasticité du cerveau.

    - puis une évidence, celle qui m'a fait comprendre à travers mes diverses expériences que mon sentiment d'épanouissement pouvait aussi procéder d'une optimisation de mon schéma cérébral, induisant l’actualisation ou l'amélioration de capacités cognitives et physiques, et que tout ceci était assujettis à une répétition de gestes particuliers, devrais-je dire aujourd'hui, de "bons gestes".

    Dernièrement, j’ai eu la chance de suivre une formation de 4 jours sur Paris, traitant des mouvements archaïques rythmiques du fœtus puis du nourrisson, responsables de sa construction et de son développement mental et corporel. Le plus étonnant pour moi fut de me rendre compte à quel point le lien entre le corps et "l'esprit", si vous me permettez d'en user, était fin, mince, arachnéen. Au premier jour, il me fut presque impossible de savoir, de qui la poule et l’œuf naissait le suivant. Mais je laisse cette épineuse question aux sémiologues, aux généticiens ou aux cosmologistes.

    Plus sérieusement, la question posée par André ROCHAIS, l'Homme « Naît-il programmé, fatalisé ? Où donc est sa liberté ? »,  et l'évidence reprise ci-dessus concernant le schéma cérébral, sont deux axes entrants fortement en résonance avec ma dernière rencontre ; le RMT (Rythmic Movement Training). En effet, à travers cette approche, nous apprenons que l'Homme "est programmé". Mais seulement pour permettre l'optimisation des facultés de son corps et de son mental. A l'interrogation sur la fatalité, paradoxalement, c'est tout à fait le contraire. Les possibilités de réadaptation, de reconstruction, ou de rééducation sont inouïes, et simples. Devrais-je dire "complexes certes mais pas compliquées".

    Les programmes, ou réflexes archaïques, initiés dans et par le châssis nerveux lors du développement d'un individu se font principalement intra-utérin et pendant les premières années de la vie du nourrisson. Exactement quand? Nous pourrions retenir l'idée qu'à partir du moment où nous savons marcher, il ne reste plus grand chose à faire qu'à utiliser ce qui est en place...ou pas. Ainsi, lorsque ces programmes ne se sont pas correctement développés, ou ne sont pas arrivés à maturation c'est à dire qu'ils sont restés à l'état de réflexes archaïques involontaires, les problèmes s'installent, parfois à notre insu jusqu'à l'âge adulte. Mais ils génèrent bien souvent de nombreux troubles très énergivores dés l'enfance.

    Au stade du fœtus et du nourrisson, l'apprentissage "primaire" passe, entre autre, par la répétition de gestes extrêmement précis permettant la mise en place de réflexes plus élaborés, dits posturaux. Et si ces gestes primaires ne sont pas complètement réalisés, quelle qu’en soit la raison - par exemple lorsque le bébé est sans cesse installé dans un landau en position assise et qu'il ne peut pas apprendre à se retourner seul ou bouger comme l'ordonne ses programmes d'initialisation - alors il accumulera des "lignes de programmes erronées" ; à titre d'exemple, les troubles de l'attention et l'hyperactivité !!!

    Bref. En aïkido comme dans tous les arts martiaux, l'apprentissage se fait aussi à travers la répétition de techniques qui, pour être efficaces, doivent être très précises. Mais pas uniquement selon moi. Elles doivent également répondre aux exigences de notre nature corporelle, et ce faisant, permettre un meilleur équilibrage tant au niveau physique qu'au niveau de notre intellect, de la gestion de nos émotions, de notre manière d'aborder et de voir le monde extérieur et l'existence. Pour être plus clair, les techniques que vous répétez si souvent et avec tant d'ardeur et parfois de souffrance, s'inscrivent dans vos schémas neuronaux. Si elles ne sont pas en "harmonie" avec votre système de fonctionnement, quels impacts peuvent-elles avoir sur vous, sur votre capacité à vous tenir debout, sur votre capacité à supporter un stress, sur votre capacité à mémoriser, sur votre capacité à comprendre votre environnement, sur votre capacité à avoir une vie spirituelle mûrement réfléchie pourquoi pas?

    Selon mon expérience, la manière dont nous vivons à travers notre pratique doit nous renseigner sur sa justesse. Dans le cas où les blessures deviennent récurrentes est le critère le plus facile à évaluer. En revanche, lorsqu'une pratique n'apporte rien d'autre qu'une dépense physique, lorsqu'elle ne permet jamais d'améliorer notablement votre sentiment d'équilibre, votre sentiment d'assurance et de confiance, dans ce cas questionnez sa sincérité.

    Avec l'immense plaisir de vous avoir donné "à suivre".

    Meda   :)

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  • La peur

    • Pourquoi ce thème aujourd'hui. J'avais envie de partager quelque chose avec vous depuis un certains temps, et une discussion avec une amie m'a donné cette occasion. Le lien qui est fait avec la pratique de l'aïkido a découlé naturellement au cours de la conversation. C'est pour moi un éclairage nouveau que je souhaitais poser ici.
      La peur et l'angoisse sont deux émotions particulièrement répandues, autour de nous, en nous, chez nos proches, dans la vie sociale, les médias, la politique. A croire que tout est fait pour les entretenir. Déjà que l'être humain semble y être particulièrement sensible, quasiment tout ce qui nous entoure "paraît" fait pour les cultiver. De mon point de vue, "paraître" n'est plus le verbe qui convient.
      Tout débute par une nouvelle assez ordinaire ; cette amie quitte son travail. Cela faisait déjà un certain temps qu'elle ne s'y plaisait plus. A cela je réponds que c'est une bonne nouvelle, eu regard ce qu'elle en disait auparavant. Et j'ajoute : "Je t'envie presque".   ???     Je me vois logiquement de lui apporter une explication. Elle ne voit pas très bien ce qu'il y a d'enviable dans le fait de "quitter son travail" dans ces conditions. J'émettrais une nuance avec le fait de "le perdre".
      Cette situation, je pense que tout le monde l'a rencontrée ou la rencontrera un jour. Et cela a été mon cas plusieurs fois déjà dans ma vie. Je l'envisage encore alors que tout va bien. Et la sensation dont j'ai le souvenir est cette confiance que tout est devant soi...possible, nouveau, excitant, en devenir. Comme une renaissance. Un sentiment de liberté inouï. A cela, elle ajoute très naturellement..."de peur un peu aussi non? Car moi je n'ai rien vu de tout cela".
      C'est à cet instant que tout démarre en réalité. La peur. Ce sentiment est tout à fait normal et sain jusqu'à un certain point. Mais ce doit être une bonne occasion de se rendre compte que nos  peurs n'ont pas de bases réelles. Si je ne me trompe pas, elles n'ont pour terreau que des suppositions négatives qui n'existent pas ou des expériences qui appartiennent au passé. Je lui rappelle un voyage que nous avions effectué ensemble en Norvège, et je lui demande si elle se souvenait avoir eu peur une fois. "Oui, une fois". Lorsque le vent soufflait très fort et que la tente "semblait" pouvoir s'envoler. Je me souviens pour ma part que j'ai dormi profondément ce soir là. L'une de mes meilleures nuits. Alors je me permets de lui faire noter que sa peur avait une raison réelle et instantanée. Elle avait peur que la tente s'envole. Néanmoins, elle ne s'était pas encore envolée. A part ça, aucune peur, aucune angoisse. Rien. Pourtant, sa vie était toujours la même, avec un travail peu passionnant et angoissant, un épisode amoureux important catastrophique soldé par une rupture.
      Mais, "trouver un nouvel emploi peut prendre du temps, et avec une rupture conventionnelle, tu ne touches pas le chômage éternellement (un an), et sans allocations on ne peut pas vivre, etc, etc. Mon 1er emploi j'ai mis un an à le trouver donc tu vois... J'ai 2 chiens à charge moi ! faut y penser ! je dois subvenir à leurs besoins !"
      Je trouve ses arguments très intéressants. Il y a d'abord la peur du temps qui nous est compté, la peur de ne pas pouvoir vivre sans argent, et la peur de ne pas pouvoir assumer des responsabilités. Tout cela est justifié. Mais ces dangers n'ont pas cours actuellement. Elle a du temps, elle a encore de l'argent et peut assumer ses deux chiens. Malgré cela, elle est déjà terrifiée. Pourquoi réagissons-nous "automatiquement" de cette manière?  Pourquoi est-ce que nous nous laissons empoisonner par des choses qui ne sont pas encore arrivées et qui n'arriveront peut être jamais?
      La vie n'est-elle pas simplement un voyage? En Norvège pourquoi pas? Ni plus, ni moins.
      Toutes ces questions ne sont pas faciles à aborder. Nous ne sommes pas préparés, entrainés ou conditionnés pour y répondre. Elle l'exprime très bien ensuite : "oui enfin juste pour terminer, tant que la peur ne me gâche pas la vie, je ne vois pas l'intérêt de me casser la tête à réfléchir comme ça ^^. L'angoisse c'est bon aussi. Si j'étais tout le temps zen, j'me ferais chier, et j'me bougerais pas autant. Alors que quand tu flippes un peu, bah tu te bouges plus, tu fais ce qu'il faut pour que ce que tu redoutes n'arrive pas par exemple. Enfin bref mon but n'était pas d'être insensible à toutes les petites choses de la vie qui font qu'elle n'est pas monotone, que ça fasse peur, que ça rende triste ou heureux, du moment qu'on ne tombe pas dans l'extrême, dans le pathologique".

      C'est ça...il ne faut pas que cela nous gâche la vie. J'aime bien ce qu'elle aborde ici ; "La monotonie" ou "l'insensibilité" sont deux notions que j'ai également questionnées. Cela a été difficile pour moi de le comprendre suffisamment, mais ne pas avoir peur ou ne pas avoir d'angoisse ne veut pas dire se désensibiliser ou rester endormi. Tout le contraire curieusement. La peur ou l'angoisse nous bloquent, et de fait rend notre vie monotone. N'est-ce pas ce qui lui es arrivé professionnellement?

      Ne pas avoir peur nous rend au contraire très sensible à ce qui nous entoure. Nous sommes à l'écoute de tout, pour tout...comme de se rendre compte qu'il faut quitter un travail ou une personne. Cela nous rend extrêmement vivant.

      Dans les arts martiaux en général comme en aïkido, j'ai souvent entendu dire que "l'immobilité, c'est la mort". Pour grandir dans nos pratiques, un élément essentiel est donc "la mobilité". Et cette mobilité, c'est la vie. Tout ce qui est à l'arrêt est mort. Tout. Il n'y a aucune exception. La mobilité dont je parle en prime abord est celle du corps bien sûr. Mais il ne faut pas oublier que l'esprit est intimement lié au corps, et inversement. Et que toute évolution de l'un, emporte l'autre dans cette évolution...vers le bas ou vers le haut. La neuro-plasticité du cerveau démontre parfaitement ce principe.

      Et qu'est ce qui nous rend immobile dans les disciplines martiales si ce n'est la peur...d'être touché (frappé), de perdre, d'échouer, d'être inférieur à, symboliquement de mourir? La peur nous empêche d'avancer, de voir avec lucidité, de croire en soi, et que sais-je encore. Selon moi, de là vient l’extrême nécessité d'être à l'écoute de ce qui nous entoure et de notre monde intérieur, de ne pas avoir peur quel qu’en soit la raison ou l'enjeu, pour voir le plus clairement possible dans quel sens il est bon d'aller pour soi. Peut être est-ce ce que certain appelle le "kokorosashi".

      Ha !!! Mais un détail m'a échappé ici. Une seule fois j'ai utilisé le mot "angoisse". Et pourtant, c'est bien d'elle dont j'ai le plus parlé dans cet article. En réalité, ce dernier est à lire en connaissance du fait que "la peur" possède toujours un objet. J'ai peur des araignées ou de me brûler. En revanche, "l'angoisse" n'a aucune raison réelle immédiate. C'est plus souvent l'idée qu'on se fait d'une situation non souhaitée, d'un éventuel résultat négatif ou de l'inconnu. Et c'est bien elle qui nous immobilise.

      Seulement, dans le langage courant, nous rassemblons sans distinction les deux. D'où, peut être, une certaine incapacité à saisir la nécessité d'étudier comment s'en détacher - de nos peurs.

      Meda

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  • Le disciple

    Être disciple, c'est imiter.

    Être disciple, cela suppose non seulement que l'on renonce à sa propre lucidité,

    à son questionnement, à son honnêteté, à son intégrité,

    mais cela sous-entend aussi qu'en devenant disciple on a un mobile :

    être récompensé.

    Mais la vérité n'est pas une récompense !

    Si l'on veut comprendre la vérité, il faut faire abstraction totale

    de toute récompense ou de châtiment.

    L'autorité se fonde sur une peur sous-jacente,

    et lorsqu'on se soumet à une discipline par crainte de ne pas obtenir

    ce que nous promet un exploiteur au nom de la vérité ou de l'expérience,

    cela équivaut à renier sa propre lucidité, sa propre honnêteté.

    Si vous dites que vous devez méditer,

    que vous devez suivre un certain chemin, un certain système,

    de toute évidence vous vous conditionnez vous mêmes

    en fonction de ce système ou de cette méthode.

    Vous obtiendrez peut-être le résultat que vous fait miroiter la méthode

    mais cela ne vaut guère mieux qu'une poignée de cendres,

    car le motif implicite est la réussite, le succès

    et c'est la peur qui est la racine de tout cela.

    Jiddu Krishnarmurti

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  • Interview Ora aïkido par "Aïkido en Anjou"

    Aiki du 49 : C’est la 3ème rentrée d’Ora aïkido traditionnel du Japon. Quel chemin a été parcouru durant ces 2 premières années ?

    Damien MEYER (formateur du club Ora Aïkido Traditionnel) :

    “- Au niveau de la pratique, on  a eu une année de  « redécouverte » puisque j’avais quitté la fédération dans laquelle je pratiquais depuis 4 ans et demi avant de décider de revenir dans l’AFATJ. Donc ce fut tout d’abord une grosse année de remise en question et de réglages, de redécouverte.

     

    - La seconde année a été moins difficile et moins « rude» dans l’entrainement, car lors de la première j’étais très exigeant de peur de me perdre ; 2009/2010 a été une saison sous le signe de l’acceptation de ce que l’on est et de son niveau, avec des allers-retours entre Angers, Paris et Senlis tous les mois pour suivre l’enseignement de mes professeurs.

    Damien MEYER
     
                              Damien MEYER
     

    - La troisième année fut de la même veine que la deuxième année, avec cependant un départ un peu difficile pour un blessé qui a été absent 2 mois et vient de revenir,  mais après avoir perdu de la souplesse. De plus, Keiji (note d’aïki 49 : Keiji est  le  président du club) ne pratique plus qu’une fois par semaine. Ce sont deux événements qui font que c’est un peu plus long à mettre en place.

    Et du point de vue historique du club ?

    - Au niveau historique, on a eu pas mal d’adhérents pour une première année, c’est-à-dire neuf. Mais ni eux ni moi n’étions prêts ; on est aujourd’hui à 4, mais ce ne sont jamais les mêmes. Beaucoup ont cessé pour des soucis de planning.

    On essaie de respecter ce que les anciens ont dit

    L’aïkido est un art martial moderne, fondé au XXème siècle. Pourquoi donc s’intituler aïkido traditionnel ?

    - Premier point, c’est pour se démarquer d’un aïkido qu’on dit moderne et qui pour moi est trop marqué par la culture occidentale et cartésienne que l’on a. J’ai l’impression que vis-à-vis de « ces approches techniques », l’aspect philosophique de l’aïkido reste une forme de  folklore qui accompagne la discipline et n’est pas une vraie recherche. Celle-ci me semble superficielle dans des approches que j’ai pu rencontrer moi-même puisque j’ai pratiqué pratiquement cinq ans dans la FFAAA. Je n’ai pas de critique à faire, chacun son choix. Traditionnel signifie qu’on souhaite revenir vers quelque chose qui ne s’inscrit pas dans les approches qu’on connait en France aujourd’hui.

    - Deuxième point, c’est respecter l’appellation de l’AFATJ, Association Française d’Aïkido Traditionnel du Japon. Ce n’est pas nous qui l’avons nommé ainsi mais Gérard Blaize. Il est un expert dans la discipline, 7ème Dan, et a  toujours des liens forts avec le Japon où il se rend 2 à 3 fois par an, peut être plus je ne sais pas vraiment.  Je pense que l’aïkido a beau être contemporain, tous les arts martiaux se nourrissent au Japon d’une histoire ancestrale qui ne date pas de cinquante ans, mais deux mille ans et plus. On essaie de respecter ce que les anciens ont dit dans la manière de pratiquer, on ne balaie pas tout en se disant « c’est ringard », « c’est une ancienne façon de pratiquer », « les anciens ont tort », certains le disent… Si les anciens ont enseigné depuis des centaines d’années d’une certaine manière, et même si aujourd’hui on ne la comprend pas, elles ont certainement une raison d’être, essayons de la comprendre avant de la mettre à l’écart. 

    Comment un jeune formateur parvient-il à toujours développer son aïkido ?

    - En gardant un contact avec des gens qui ont un haut niveau. Avoir toujours un professeur est important. Gérard Blaize a perdu le sien en 2004. Il était 10éme dan d'aïkido.

     

    Sensei 2  Gérard BLAIZE et son professeur, HIKITSUCHI senseï pratiquant le Masakatsu Bo-Jutsu.

     

    Il y a eu un questionnement dans le groupe à ce moment-là. Perdre son professeur, qu’est-ce qu’il y a après, qu’est-ce qu’on fait ? Est-ce qu’on marche seul, dans quelle direction ? Je pense que Gérard Blaize garde des liens avec des personnes qu’il connaît bien ; il y a Anno Sensei qui a pris la suite à Shingu. Et puis, lui-même a toujours d’autres professeurs dans d’autres disciplines.

    - Un jeune formateur fait comme les anciens, il a un professeur. Et puis il essaie de se remettre en question en permanence. En gardant une certaine confiance mais également en se questionnant. Par exemple, se dire, « tiens je fais ça depuis 2 ans, mais ce point technique,  même si cela n’est pas faux, peut-être qu’il est temps de passer à autre chose ?». Il y a peut-être

    quelque chose que l’on n’a pas encore vu, que l’on découvre, il faut toujours rester ouvert à ça. Ce n’est pas parce qu’on arrive à faire une technique aujourd’hui qu’elle est immuable et qu’elle ne bougera plus.

    - Et puis, je m’inscris à d’autres disciplines, j’ai commencé le Junomichi en mars dernier auprès de Loïc Le Hanneur, que je reconnais comme un expert ; il est reconnu par ses pairs en tant que tel. Il est un des fondateurs de la fédération de junomichi. Il a un super niveau et cela aurait été pour moi une bêtise que de passer à côté. Cela a été un investissement, c’est clair, pas tant que ca en temps mais au niveau financier. C’est un choix, j’ai la chance d’avoir Loïc Le Hanneur à côté de moi. Ce n’est pas la même pratique que l’aïkido dans la forme mais les principes, on les retrouve, et j’apprends des tas de choses.

    Le corps s’adapte au bâton et non pas l’inverse.

    Parmi d’autres spécificités, tu proposes le travail du Bô (note d’aïki 49 : bâton long, d’environ 1,80m), quelle en est l’origine, et quel en est l’intérêt ?

    - L’origine, je n’en sais rien. Je ne me suis pas intéressé au Bo Jutsu comme j’ai pu le faire pour l’aïkido et son histoire. Par contre, l’intérêt est que l’on travaille avec une arme et qu’on ne ressent pas les mêmes choses que lorsqu’on travaille avec un partenaire. C’est une école beaucoup plus rigide que d’autres écoles martiales du type Junomichi, Judo, aïkido,  parce qu’on n’a pas le droit, selon ce que j’en connais, d’avoir une position qui ne convienne pas à l’arme. C’est comme ca que les professeurs me l’enseignent : le corps s’adapte au bâton et non pas l’inverse.

    - En aïkido on pourrait dire qu’on s’adapte au corps du partenaire, là notre corps s’adapte au bâton. Et puis il y a des parallèles énormes avec la pratique de l’aïkido, et c’est surtout pour cela qu’on le pratique. Par exemple, pour le placement, dans notre façon de pratiquer l’aïkido, le fait d’avoir les pieds sur une ligne, ce n’est pour nous qu’un passage. Donc, on ne commence pas une technique avec les 2 pieds sur la ligne et on ne la termine pas comme ça. C’est juste un passage, bien sûr à un moment donné les pieds vont se croiser mais du coup on a plutôt l’habitude de pratiquer sans garde, c’est-à-dire un pied de chaque côté du centre, (note d’Aïki 49  : perpendiculaire à la ligne d’attaque), Le bâton se place au centre de nos pieds, et qu’on ait une garde à gauche ou à droite, nos pieds ne seront jamais sur la même ligne, on pourra laisser le bâton entre les 2 pieds ; le Bo  nous apprend à tenir une position en triangle et non pas sur la même ligne, et éviter tout déséquilibre. Cela apporte des sensations au niveau des hanches que l’on peine à percevoir en aïkido. Il y a aussi le fait d’être bien centré. Quand on frappe yokomen ou shomen, si on est mal centré, on se fait embarquer par l’arme. En aïkido, sur une frappe Yokomen, on vient souvent frapper et le corps part déjà dans une spirale alors que le partenaire n’a pas encore bougé ! C’est comme dire « vas-y, fais-moi la technique, je commence déjà à partir en rond, génial, c’est super ». Le bâton nous montre que ce n’est pas possible, que c’est faux.

    Le Bojutsu ferait donc partie d’un travail d’O’Sensei à l’origine ?…

    - Apparemment, oui.

    …Il aurait été oublié au détriment du Jo, du Boken et du tanto ?

    - C’est un parti pris, c’est peut-être un choix qui a été fait lors du développement de l’aïkido par certaines fédérations. De notre côté, Gérard BLAIZE nous transmet le Masakatsu Bo jutsu; ce n’est pas lui qui l’enseigne aujourd’hui du moins assez rarement, mais plutôt un de ses élèves, bien qu’il soit 5ème Dan de Masakatsu Bo jutsu me semble-t-il.

    A quoi peut s’attendre une personne, qu’elle soit débutante ou expérimentée, en venant assister à une séance d’ORA aïkido ?

    - Il sera accueilli avec beaucoup de respect, on est toujours contents d’accueillir quelqu’un, c’est évident. Il vient, il monte sur le tapis, et puis voilà. Après, est-ce qu’il a envie de continuer ou pas, c’est son choix.

    Keiji HORIBE    
             Keiji HORIBE, président de Ora aïkido

    J’ai toujours en tête l’idée de sens

    En dehors de l’aïkido, tu détiens un diplôme de responsable de formation pour les adultes, est-ce que cela bouscule ta façon d’enseigner l’aïkido ?

    - J’ai cru que cela bousculerait, j’ai vraiment cru que ça changerait la façon d’enseigner telle que je l’ai reçue. J’ai essayé d’aller vers des fiches outils : « tiens, ce principe-là, je trouve qu’on peut bien le travailler avec telle ou telle technique, ou de telle manière ». J’ai essayé. J’ai très vite eu le sentiment que cela allait à l’encontre de ce en quoi je croyais : la façon de faire de l’AFATJ. J’avais l’impression de revenir vers la technicité assez rude et dure et qui peut-être à terme ne pourrait plus s’adapter. Dire : « ce principe là, je le travaille de telle manière », c’est peut-être parce que j’ai des attaquants en face de moi qui me l’on fait voir de telle manière. Du coup la fiche outil ne servirait qu’à ces gens-là. J’ai abandonné cette idée assez vite.

    - Par contre, j’ai toujours en tête l’idée de sens, de donner du sens à ce qu’on fait,  de la logique. Se dire, voilà, ce geste là, il ne vient pas de n’importe où, on le fait pour telle raison, peut-être que historiquement aussi cela vient de l’usage d’une arme, etc. et puis on a des principes que parfois on ne comprend pas beaucoup comme celui de ne pas attendre (note d’Aïki 49 : ne pas attendre l’attaque). C’est un principe que je présente de la façon : « il faut le faire », faut pas attendre, même si on avance sur la personne, même si on a l’impression que c’est tricher, et bien tant pis.

    - La formation de formateur a changé ma capacité, ma présence d’esprit à me questionner, à me dire voilà, je suis là-dessus, je m’arrête là-dessus. Ca me permet aujourd’hui d’être en permanence en mouvement sur ce que je fais, sur ce que je ressens, ca m’a apporté une faculté de compréhension.

     

    C’est une forme de méta-cognition ?

    -Oui, c’est ça.

    Quel est le déroulé d’une séance ORA aïkido ?

    -On est hébergé par Anjou Dojo (note d’Aïki 49  : voir lien de présentation) Loïc Le Hanneur a agencé son dojo de façon à s’approcher le plus possible des ambiances que lui retrouvait lorsqu’il pratiquait le judo au Japon. En arrivant, on doit se déchausser, mettre des sandales pour aller plus loin dans le dojo et dans les vestiaires ; il y a une sorte de sas pour ranger ses chaussures. On va se changer, on revient, on se met sur le tapis, on salue, et on a toute une partie d’entrainement qui commence par …, et je pense que c’est une de nos spécificités, on a un échauffement classique comme n’importe qu’elle autre école, et ensuite on a le Shinkon  kishin no hoo qui sont des exercices de respiration et de concentration. C’est tiré historiquement d’une secte. En France le mot secte n’a pas la même connotation qu’au japon, enfin bon, c’est la secte d’Ōmoto-kyō 大本教, du bouddhisme Shingon, on va dire ca comme ca. O Sensei a beaucoup fréquenté ces gens-là à un moment donné de sa vie et il l’a intégré à son étude et à sa recherche en aïkido. Donc ce sont des exercices qui descendent directement de O Sensei et ont été transmis par certains de ses élèves. Si on exclue l’aspect spirituel, religieux qui apparait, c’est surtout un moyen de couper la journée passée et l’entrainement. C’est vraiment un sas de décompression ou de lavement, ce sont des exercices pour « s’unir au divin et purifier l’âme » !

    - Quand on a fini ces exercices, on essaie de pratiquer sans interruption, démonstration de l’exercice à faire, éventuellement on pointe un aspect ou deux que l’on veut travailler dans la technique, par exemple on insiste plus sur les hanches, et ensuite on prend la technique dans sa globalité mais en se concentrant sur les hanches, 4 techniques chacun à tour de rôle, sans interruption, même entre les 4 techniques, sans attendre. De là vient notre principe « ne pas attendre », même si notre geste paraît largement en avance de ce que l’autre présente comme attaque ; si on attend l’attaque, de toutes façons, c’est trop tard, on sera dessous ou stoppé, ou alors il faudra passer par d’autres moyens.

    - Quand on réalise une technique, on essaie de la faire avec quelques règles, un cadre qui permet au corps de sentir à un moment donné « j’étais dans le bon timing, uke n’a rien pu faire, il a été pris par le mouvement ». En fait, il y a eu comme une explosion  soudaine et puis c’était terminé.

    Le but est d’aller au point de fatigue pour découvrir la sensation du geste juste 

    C’est   un travail qui nécessite une bonne condition physique ?

    - Pas nécessairement, Je pense qu’on se fatigue beaucoup plus quand on est jeune, quand on débute. Parce qu’on apprend, on a du mal à économiser. A force, on peut pratiquer une même technique 20 à 25 mn sans s’arrêter, ça ne pose pas de problème particulier. De plus, la condition physique vient avec le temps. Lors de la visite médicale, le médecin m'a dit que j’avais le cœur d’un sportif de haut niveau, alors que je ne cours même pas. C’est une  chose dont je ne me suis pas spécialement soucié. Je bouge, c’est tout. Ceux qui sont avec moi ne sont pas complètement largués, loin de là. Chacun va à son rythme. De temps en temps, je vais pousser un petit peu : le corps se fatigue alors, et à un moment donné, cela va permettre de faire ressortir des techniques justes. Le corps se détend, et on n’est plus à penser « comment je vais prendre la technique ? ». Quand on est fatigué on commence à être un peu perdu dedans et c’est là où le corps commence à réagir tout seul. Oui, quelque part un des buts est d’aller à son point de fatigue pour découvrir la sensation du geste juste, mais chacun à son rythme.

     

    Ton impression sur ces questions ? Y a-t-il des points que tu aurais voulu aborder ?

    - Non.

     

    Quels sont les objectifs à court terme d’ORA aïkido ?

    - Ce serait d’être un peu plus nombreux sur le tapis, parce que ça manque d’énergie. A s’entrainer à 2, 3 ou 4, c’est beaucoup plus difficile de tirer le groupe (à partir de 3 on est un groupe !) vers une pratique qui a un rythme, une énergie.

     

    J’aime bien  être là, il y a un bon esprit

    Que peux-tu nous dire sur le site Anjou Dojo ?

    - Ce qui s’y passe ? Il y a 2 clubs de taï-chi, et un club de kyudo avec Sophie Le Hanneur. Il y a des cours de Junomichi 2 fois par semaine, pour parents et enfants.

    - Sinon, si on sort de la pratique pure et dure, je trouve qu’il y a un esprit. Un esprit que je recherchais et que Loïc veut faire vivre. L’esprit des arts martiaux, ce n’est pas seulement l’étiquette, le respect, etc., ce ne sont pas seulement des mots sur une affiche. C’est quelque chose qui se travaille tous les jours entre les gens qui utilisent le lieu, entre les gens qui pratiquent entre eux, avec le respect de la pratique de l’autre. Je trouve qu’il y a un échange, je suis allé plusieurs fois faire du taï Chi, certains membres du taï chi sont venus faire de l’aïkido avec nous. Le Junomichi n’est pas encore venu mais beaucoup disent qu’ils  aimeraient bien. J’aime bien  être là, il y a un bon esprit, un esprit de pratique, c’est sérieux. Loïc m’a dit souvent « je ne veux pas de pratique ici où ils se cognent dessus ». Il ne veut pas de taekwondo, ou de karaté comme l’école kyokushinkai, qui est violent, même si cette forme a son intérêt. Loïc reste dans une pratique des arts martiaux qui encourage la souplesse, la douceur dans le geste plutôt que l’affrontement ou l’opposition. Il aime beaucoup reprendre cette formule : « le minimum d’effort pour le maximum d’efficacité ».

    Interview réalisé le 17 décembre 2010

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  • Paradoxe.

    Pour nous, l'aïkido dépasse la simple notion d'art martial. Ce terme est trop souvent associé, à tort, à la force destructrice, le pouvoir, le contrôle sur l'autre. Hors, les « Arts » dits martiaux ont été historiquement crées par des hommes dont le soucis était de protéger, de sauvegarder, d'apaiser l'âme et le cœur en chacun.

    Plus communement, l'aïkido est donc un art martial japonais, qui tire ses secrets d'une longue tradition de combattants, et dépassant bien entendu les frontières géographiques et culturelles nippones. Mais c'est dans un paradoxe parfois déroutant que cette discipline évolue. Issue des champs de batailles, ses techniques se sont progressivement arrondies, non tant par leurs formes que par leurs finalités. En effet, alors que beaucoup d'arts de combats proposent la destruction – légitime ou non - d'un agresseur, l'aïkido en tant que discipline, prend le pari d'apporter un enseignement basé sur le combat mais dont la finalité est la conservation physique, aussi, de l'agresseur lui-même. Ne dit-on pas que la violence appelle la violence ? N'a-t-on pas non plus de flagrants exemples dans certaines parties du Monde où des conflits devenus incompréhensibles n'en finissent plus ?

    Vivre l'expérience d'une technique d'aïkido parfaitement exécutée vous vide instantanément de toute velléité. Que de difficultés alors à entrer de nouveau dans la concentration que demande le travail d'une attaque sincère après un tel événement !!! Certes, cette étude peut prendre une vie entière. Mais quels bénéfices ne reçoit-on pas ?

    J'ajouterai que l'aïkido n'est pas la seule discipline dont les valeurs dépassent la dimension de vaincre. Il ne s'agit finalement que d'une forme parmi d'autres. Seulement, celle-ci revêt semble-t-il plus clairement, les habits de ses principes.

    Si on accepte le postulat que l'aïkido est la "voie de la rencontre des énergies", en quoi le kendo, le judo, le taïdo, le iaïdo, le shodo, le shado, le kyudo...ne seraient pas à même de proposer dans leurs formes, cette rencontre ? Je suis persuadé qu'ils le font. Certains senseï ne nous disent-ils pas que le but ultime est d'oublier les techniques ? Et à bien y penser, dans un combat au sens le plus pur du terme, quelle convention existe à part celle de vivre l'instant, "dans" l'instant et "pour" l'instant.

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